dimanche 10 janvier 2010

L'IMPORTANCE DU RENSEIGNEMENT D'ORIGINE ÉLECTROMAGNETIQUE DANS LE SUCCES DE LA LIBERATION D'INGRID BETANCOURT


13-07-2008

Cette note n'a pas pour but d'alimenter la polémique sur les conditions exactes de la libération d'Ingrid Betancourt. Mais il parait important de souligner que cette opération ne doit pas son succès qu'à la seule audacieuse opération de déception des forces colombiennes, mais également à cinq années de recueil de renseignement d'origine électromagnétique[1]. Une opération principalement menée par la NSA[2] et dont le nom de code était Alliance.

Formation israélienne

Bien que Bogota ait revendiqué l'entière paternité de cette action, il semble indéniable qu'au moins deux intervenants extérieurs y aient joué un rôle important. En premier lieu, Israël à travers la société Global CST. Cette dernière avait répondu, courant 2007, à un appel d'offres de l'armée colombienne d'un montant de 10 millions de dollars. Hormis le fait que cette société spécialisée dans le conseil en matière de sécurité soit dirigée par un général des cadres de réserve de Tsahal, Israël Ziv, et emploie bon nombre d'anciens des forces spéciales israéliennes, ainsi que du Shabak, voire même du Mossad, c'est après accord du ministère israélien de la Défense que Global CST a pu conclure ce contrat avec la Colombie. Un contrat comprenant essentiellement la formation et le conseil des unités spéciales colombiennes.

D'autre part l'État hébreu a également fourni des drones, du matériel électronique, notamment des systèmes d'interception. Un domaine qui, au regard des différents éléments relatifs à cette opération, a joué un rôle de premier ordre dans cette affaire.

Le rôle prépondérant des Etats-Unis

On se souvient du 1er mars 2008, lorsque certaines sources qualifiées de « bien informées » avaient annoncé que le raid de l'armée colombienne en territoire équatorien avait été déclenché après l'interception puis la localisation du téléphone satellitaire de Raul Reyes. Un raid qui a coûté la vie au numéro 2 des FARC. Cette localisation n'avait pu se faire qu'avec l'aide des États-Unis[3].

Selon une source proche des milieux officiels américains ayant requis l'anonymat, le succès de l'opération Jaque qui a permis la libération des 15 otages, dont Ingrid Betancourt, serait en partie due à l'exploitation de cinq années d'écoutes. La première communication interceptée l'aurait été en mars 2003. Il s'agissait d'une conversation entre Nancy Conde, responsable régionale de l'approvisionnement de la guérilla, et un contact à Miami. L'appel avait pour but d'acquérir des téléphones satellitaires. Arrêté par le FBI, le contact américain de Nancy Conde accepta de mettre cette dernière en relation avec une société contrôlée par les fédéraux, en échange d'une réduction de peine. Ainsi ce sont plusieurs centaines de téléphones satellitaires et autres appareils de radiocommunications qui ont été acheminés vers les maquis des FARC, après avoir été préalablement piégés électroniquement par les services américains. Près de 5 000 communications ont pu ainsi être écoutées et exploitées. Un nombre considérable de renseignements aussi divers que variés, ont de ce fait été recueillis. Cela allait des commandes d'armes à de l'équipement chirurgical en passant par des préservatifs. Toutes ces informations ont notamment permis de reconstituer l'ordre de bataille des FARC et d'estimer ainsi l'importance de leurs effectifs. À titre d'exemple, les analystes américains on pu déterminer que l'essentiel des communications téléphoniques internationales était centralisé à Villavicencio, pour être ensuite redirigé vers la jungle par des moyens radio.

Les combattants marxistes semblaient avoir une préférence pour les émetteurs récepteurs de la marque ICOM, notamment les modèles V-8. Ces derniers, d'une puissance de sept watts, couvrent la gamme comprise entre 136 MHz et 174 MHz. Il est intéressant de noter que la gamme radioamateur dite des 2 mètres y figure. De plus, une option permet de lui adjoindre un système de cryptophonie. Ce dernier, s'il rend inintelligible les communications pour tous ceux qui ne disposeraient pas du module ad hoc, n'empêche pas sa détection et sa localisation. De plus le système en question n'est pas suffisamment élaboré pour résister à la NSA, d'autant que l'on sait maintenant que ce matériel a été fourni par une société contrôlée par les autorités américaines. Compte tenu des caractéristiques de ces appareils et des conditions d'utilisation, leur portée ne peut dépasser quelques dizaines de kilomètres. Leur interception nécessite donc d'être à proximité ou bien d'utiliser de plateformes aéroportées d'écoutes, option que semblent avoir choisi les Américains.

C'est donc grâce aux informations fournies par la NSA sur le fonctionnement des réseaux de communications de la guérilla que les Colombiens ont pu pénétrer les différents niveaux de commandement des FARC et mener à bien l'opération Jaque. Par ailleurs, il n'est pas anodin de signaler que Nancy Conde était devenue la petite amie d'un des geôliers d'Ingrid Betancourt, le fameux Cesar, de son vrai nom Gerardo Aguila. Ce fait alimente la rumeur sur le possible « achat » dudit geôlier. D'autant que Nancy Conde se trouve entre les mains des autorités colombiennes depuis le 2 février 2008, date à laquelle elle a été arrêtée alors qu'elle rentrait en Colombie, en provenance du Venezuela.


  • [1] Les anglo-saxons utilisent le terme COMINT pour Communication Intelligence.
  • [2] National Security Agency.
  • [3] Radio Méditerranée internationale le 24 mars 2008 et Renseignor n°513 du 30 mars 2008.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire